Symposium SFO 2018. Intelligence artificielle

Innovation : visions partagées
Quelle médecine pour demain ?
ou la vision des ophtalmologistes et des philosophes
Symposium organisé par Novartis le 6 mai 2018
D’après l’intervention du Pr Philippe Denis (Lyon)
Le glaucome est une pathologie sévère et potentiellement cécitante touchant près de 60 000 personnes dans le monde, et dont les dépenses qui permettent de favoriser l’innovation, s’élèvent à près de 6 milliards d’euros.
La pathologie glaucomateuse reste encore sous-diagnostiquée et de nombreux patients ne sont toujours pas traités de façon optimale étant donné la difficulté d’évaluer le rythme d’évolution des patients.
L’évolution de l’imagerie, notamment celle du nerf optique et du champ visuel (CV), a révolutionné nos choix thérapeutiques. Elle permet d’être plus précis dans l’évaluation de la progression du glaucome. Grâce à l’OCT, la visualisation de la raréfaction des couches cellulaires secondaire au glaucome est désormais possible et de nouveaux algorithmes du CV sont développés.
L’efficacité de nos thérapeutiques actuelles peut être révisée, car un grand nombre de nos patients traités continuent à évoluer. La recherche sur la neuroprotection pour protéger les cellules ganglionnaires constitue l’un des objectifs les plus importants. En chirurgie, de nouveaux petits drains chirurgicaux (MIGS), efficaces mais coûteux, sont apparus.
Certains systèmes extraoculaires ont été développés pour insérer les collyres, et de nouvelles familles thérapeutiques sont apparues, tels les inhibiteurs des rho-kinases (ROCK), qui agissent sur les cellules musculaires du trabéculum.
Pour conclure, le glaucome est une maladie d’évolution lente, dont la sécurité d’emploi reste la priorité.
D’après l’intervention du Pr Ramin Tadayoni (Paris)
Parmi les dernières avancées en médecine, nous remarquons que l’examen d’aujourd’hui est de plus en plus médié par des assistances techniques. En effet, aux États-Unis, la Food and Drug Administration a déjà validé l’intelligence artificielle (IA) pour le dépistage de la rétinopathie diabétique (AMM FDA idX-DR).
En thérapeutique, la tendance actuelle est de viser le caractère curatif définitif, ou du moins le plus durable possible, comme par exemple avec le nouvel anti-VEGF (brolucizumab), qui permet de s’affranchir des injections mensuelles, ou avec le voretigene (neparvovec-rzyl), dont l’objectif est d’améliorer la vision au moyen d’une seule injection sous-rétinienne définitive. De la même façon, le CRISPR Cas9 a été conçu pour reprogrammer (définitivement) les gènes des patients.
Dans cette médecine de demain, les patients sont au centre d’un système avec d’importants enjeux éthiques et légaux, et les médecins restent encore garants du diagnostic, du traitement et de leur sécurité. La seule façon de se positionner à l’avenir ne sera pas de faire le diagnostic, ni de choisir le traitement, mais de rester auprès du patient pour lui tenir la main, même lorsqu’il sera « à genoux ».
D’après l’intervention de Luc Ferry
Nous vivons une troisième révolution industrielle, avec le développement de l’IA, qui va changer nos vies et nos métiers dans les 30 ans qui arrivent et qui aura 3 retombées :
- une économie collaborative et son impact économique et politique, comme par exemple avec airbnb qui représente aujourd’hui 30 millions de capitalisation en bourse ;
- une révolution dans la mobilité et dans le monde du travail ; les 3 millions de chauffeurs actuels aux États-Unis seront tous remplacés dans 20 ans (cf. nouvelle voiture Tesla) ;
- le projet transhumanisme, qui repose sur 3 idées fondamentales : ajouter à une médecine thérapeutique (soigner et réparer) une médecine « augmentative » (augmenter l’être humain pour le rendre plus résistant) ; lutter contre la vieillesse dans le but d’accroître la longévité humaine ; et enfin corriger la nature et ses inégalités.
Cela sera rendu possible par l’IA, dont il existe 3 types :
- l’IA faible qui, grâce à la reconnaissance visuelle, permet d’établir des diagnostics mais qui reste cantonnée à son application ;
- l’IA contextualisante, qui est capable d’adapter une décision en fonction du contexte ;
- l’IA forte, qui consiste à fabriquer des connexions de neurones sur des bases non biologiques, incluant toutes les émotions humaines, la conscience de soi et le libre arbitre (fabrication d’une post-humanité).
Avec le développement de l’IA, le travail des médecins deviendra de plus en plus « assisté », mais ne pourra pas être complètement remplacé.
Marie Beylerian
L’intelligence artificielle en ophtalmologie
Symposium Optic 2000
Ce symposium a permis de faire le point sur l’intelligence artificielle (notamment les travaux sur les rétines artificielles) et sur les innovations actuelles de l’Institut de la vision.
Rétine artificielle : de la modélisation à la prothèse rétinienne
D’après l’intervention de Serge Picaud (Paris)
L’enjeu actuel des implants rétiniens est d’améliorer la résolution de l’image. L’implant, composé de silicium, est glissé sous la rétine afin d’activer les neurones rétiniens et ainsi de permettre une perception lumineuse aux patients. À la différence d’une caméra classique, qui enregistre l’information de façon constante, les nouvelles caméras intelligentes associées aux implants rétiniens sont dites « événementielles ». Elles enregistrent des intensités lumineuses et envoient ainsi des informations positives ou négatives de la scène visuelle.
Diagnostic et analyse d’images assistés par intelligence artificielle
D’après l’intervention de Vincent Borderie (Paris)
L’analyse d’images a été développée grâce à des algorithmes initialement conventionnels qui utilisent une succession de fonctions mathématiques puis l’intelligence artificielle avec le deep learning qui fonctionne avec des réseaux neuronaux convolutionnels.
Les avantages du deep learning sont l’utilisation d’une base de données importante, dite Big Data, une fiabilité et une performance finale supérieures à celles de l’homme.
Sa première application en ophtalmologie est l’analyse d’images par l’apprentissage profond supervisé.
Sa première utilisation avait pour objectif le dépistage des rétinopathies diabétiques à référer sur des photos du fond d’œil, et par conséquent la pose de diagnostics de rétinopathies proliférantes ou non et de maculopathies diabétiques œdémateuses ou non. Une deuxième utilisation concerne le diagnostic de la DMLA. On utilise des photos du fond de l’œil ou des coupes OCT de la macula afin d’établir une classification binaire : DMLA versus pas de DMLA, ou DMLA à référer versus pas de DMLA avec un objectif quantitatif de segmentation des images.
Une autre étude intéressante utilise le deep learning dans la segmentation du fluide intra- et sous-rétinien, permettant une quantification des œdèmes.
C’est de ce fait une véritable aide au diagnostic humain (notamment en télémédecine) et à la décision thérapeutique, ainsi qu’une évolution vers une médecine personnalisée.
Impact de l’intelligence artificielle en ophtalmologie
D’après la communication de Carlos Ciler
RetinAI a élaboré un logiciel d’analyse d’images du fond de l’œil et d’OCT qui apporte une aide au diagnostic précoce et à la réalisation de rapports médicaux automatiques. La start-up soulève aussi le problème de l’accès aux soins dans les pays sous-développés ou en voie de développement. Elle a mis au point des technologies qui démocratisent le dépistage et l’accès aux soins grâce, entre autres, à un objectif fixé au smartphone et permettant de réaliser des photos du fond de l’œil qu’on peut adresser aux ophtalmologistes.
Un exemple d’innovation actuelle : Smart connected eyewear
D’après la communication de Andrea Castagnetti
La start-up Ellcie Healthy a mis au point des lunettes connectées qui permettent de lutter contre l’endormissement au volant. On étudie la corrélation entre la fréquence des clignements et la fatigue. Les mouvements oculaires et les clignements sont enregistrés et le niveau de risque est analysé. Les lunettes envoient une alerte via le smartphone lorsque le risque d’endormissement est élevé.
Hélène Beylerian