MasterClass de la SAFIR par l’ANJO

Chirurgie de la cataracte postchirurgie réfractive : paramètres à prendre en compte
Junior : Sophie Catanese.
Senior : Pascal Rozot.
Les problématiques principales sont l’exigence du patient qui est habitué à son emmétropie et la difficulté du calcul d’implants due à la modification des paramètres biométriques en lien avec la chirurgie réfractive.
Comment obtenir un calcul d’implant fiable ?
Cas clinique - Patiente de 64 ans opérée de Lasik myopique aux 2 yeux, qui présente une CCN avec myopisation d’indice et baisse d’acuité visuelle. Objectif : monovision.
Les topographies retrouvent un aplatissement et une pachymétrie fine, résultant de la chirurgie réfractive préalable. Il existe un indice de diffusion important aux 2 yeux.
En l’absence d’histoire réfractive, nous pouvons utiliser :
• La formule de Barrett : True-K no history formula, version modifiée de la Barrett classique ;
• La formule de Haigis-L, seule formule valable pour la KR ;
• La formule de Shammas, qui calcule la kératométrie corrigée (myopie → 1,14 x Kmesurée -6,8 ou hypermétropie 1,0457 x Kmesurée -1,9538) ;
• La formule de Rosa.
Il existe également un outil disponible sur le site de ASCRS (American Society of Cataract and Refractive Surgery) qui, à partir de quelques données simples de kératométrie et de réfraction, peut fournir des valeurs à l’aide de différentes formules. Il restera à éliminer les valeurs aberrantes afin d’obtenir une moyenne cohérente. Grâce à cet outil, la cible réfractive de notre patiente a pu être atteinte avec une marge d’erreur acceptable.
Quid de l’intelligence artificielle ?
• Formule Hill-RBF : Biomètre Haag-Streit Lenstar, optimisé pour les implants Alcon SN60WF, extrapolation possible aux autres implants.
• Formule PEARL-DGS (Postoperative spherical equivalent prediction using artificial intelligence and linear Algorithms, developed by Debellemanière, Gainel and Saad) qui, à l’instar de l’ASCRS, permet d’obtenir à partir des données biométriques la puissance de l’implant nécessaire.
Cas clinique - Patiente de 70 ans aux antécédents de kératotomie radiaire aux 2 yeux et un laser photoablatif à l’œil gauche, qui présente une cataracte corticonucléaire aux 2 yeux. Objectif : emmétropie aux 2 yeux.
Les topographies retrouvent un aplatissement central et un astigmatisme asymétrique. Il existe un indice de diffusion augmenté de manière significative aux 2 yeux.
• La formule de Haigis-L est utilisée selon les résultats des études récentes qui montrent son utilité sur les yeux ayant des antécédents de kératotomies radiaires.
• Le calculateur de l’ASCRS est également testé.
Les résultats sont concordants pour les 2 formules.
À noter que si nous disposions de la kératométrie initiale, la simple formule K corrigée = K initiale-Différence réfractive obtenue aurait pu permettre de déterminer la kératométrie corrigée. Mais attention : la kératométrie corrigée ne tient pas compte de la face postérieure de la cornée (très modifiée en cas de KR).
En cas de disponibilité de l’histoire réfractive, nous pouvons utiliser :
• La formule du double K (Aramberri) :
- la kératométrie préop. détermine la position de l’implant,
- la kératométrie postop. détermine la puissance de l’implant ;
• La formule du Corneal ByPass (Ladas-Stark) :
- la kératométrie préop. détermine la position de l’implant,
- la kératométrie corrigée détermine la puissance de l’implant.
Quelles sont les spécificités opératoires et postopératoires ?
• En cas de KR, il faut éviter de croiser kératotomies et voies d’abord, la suture n’est pas systématique mais il faut limiter l’hydrosuture pour éviter un astigmatisme induit.
• Il n’existe pas de spécificité peropératoire dans le cas d’une photoablation.
• En cas de KR, une hypermétropie transitoire est possible.
Conclusion
La chirurgie réfractive modifie la kératométrie, pouvant induire des erreurs de calcul de la position effective de l’implant. Le choix de la formule de troisième génération à utiliser dépendra du type de chirurgie réfractive pratiquée et de la disponibilité (ou non) des valeurs kératométriques préopératoires. Les calculs d’implants devront être confrontés aux logiciels d’IA qui donnent des résultats fiables.
Chirurgie réfractive chez l’hypermétrope
Junior : Ysé Borella.
Senior : Alexandre Denoyer.
Les premières chirurgies réfractives de l’hypermétrope datent des années 1990.
Les caractéristiques des patients se présentant pour une chirurgie réfractive de l’hypermétrope sont souvent : âge plus avancé, nécessité de prendre en compte la capacité d’accommodation, exigences visuelles importantes.
De ce fait, la présence d’une zone de transition est indispensable entre le centre artificiellement bombé et la périphérie.
Chez l’hypermétrope :
• les particularités anatomiques : diamètre cornéen plus faible, œil plus court → Donc un angle Kappa plus important avec pupille nasale (pour rappel, l’angle Kappa est l’angle entre l’axe visuel et le vertex) ;
- il faudra centrer le traitement sur l’axe visuel et non le vertex, au risque d’induire des aberrations optiques et de l’astigmatisme, dégradant le résultat visuel,
- il faudra surveiller la valeur de la kératométrie maximale postablation pour éviter d’une part le risque d’aberrations optiques, et d’autre part le risque de régression ;
• la réfraction sous-cycloplégie est systématique du fait des capacités d’accommodation ;
• le volume de tissu ablaté est plus important (à nombre de dioptries égal) mais en périphérie (où la cornée est plus épaisse), donc les cornées fines sont un facteur limitant moindre, le capot peut être raisonnablement de 120 ou 130 microns ;
• la zone optique efficace plus réduite ;
• la zone de transition doit être étendue pour éviter les effets photiques ;
• le capot de Lasik doit être de plus grand diamètre afin d’avoir une zone optique efficace correcte, cependant, face aux petits yeux (et donc petit WTW) de l’hypermétrope cela peut être problématique.
Plutôt Lasik ou PKR ?
La PKR va induire plus d’hyperplasie épithéliale, donc plus de risques de régression. Le Lasik a, a priori, des résultats plus stables dans le temps, même si aucune étude de haut niveau n’en a apporté la preuve. Il est admis qu’en première intention et en l’absence de contre-indication, le Lasik doit être proposé. La PKR sera envisageable en cas de contre-indication au Lasik, en informant le patient du risque de régression.
Et le presbyte ?
L’apparition de la presbytie chez le patient hypermétrope s’accompagne d’un démasquage tardif de son hypermétropie. Sa correction nécessite de tenir compte de la réserve accommodative (addition minimum). Les hypermétropes avec une réserve accommodative correcte (Add +1,50) sont d’excellents candidats pour le presbyLasik, qui permet de mettre en place une multifocalité. La chirurgie du cristallin clair sera préférée chez les patients plus âgés.
Suites opératoires
Les suites opératoires peuvent être marquées par une petite myopie initiale. En effet, les profils d’ablation tiennent compte de la régression et il existe une légère surcorrection initiale, qui régresse généralement. Dans le cas d’une surcorrection, la PKR sur capot sera privilégiée, tandis que la reprise du capot sera privilégiée en cas de sous-correction.
Chirurgie d’implant phake : indications, avantages, limites
Junior : Victor Vermot-Desroches.
Senior : Liem Trinh.
Les implants actuels se posent dans le sulcus, dans la chambre postérieure, en arrière de l’iris et en avant du cristallin. Ils sont particulièrement indiqués pour les fortes amétropies. La condition indispensable pour envisager de proposer un implant phake est une profondeur de la chambre antérieure supérieure à 3 mm.
Les 2 types d’implants phakes les plus utilisés sont l’ICL et l’IPCL. Les implants présentent 1 ou plusieurs trous d’évacuation de l’humeur aqueuse. Le fabricant met à disposition un calculateur spécifique.
• ICL : détermine la puissance de l’implant et sa taille à partir de la profondeur de chambre antérieure et le blanc à blanc. Les mesures intraoculaires n’étant pas prises en compte dans ce nomogramme, la confrontation avec des formules fondées sur les mesures spécifiques intraoculaires est nécessaire.
• IPCL : détermine la puissance de l’implant et sa taille à partir de la profondeur de chambre antérieure et le blanc à blanc et les mesures intraoculaires.
Indications
- Patient de plus de 21 ans avec amétropie stable
- Défauts cornéens
- Fortes amétropies
Contre-indications
- Chambre antérieure inférieure à 3 mm
- Angle fermé
- Pathologie du segment antérieur : glaucome, perte endothéliale
Avantages
- Technique réversible
- Très bonne prédictibilité
- Sécurité et efficacité prouvée
- Large zone optique (intéressante car patients jeunes aux pupilles étendues) : moins d’HOA, meilleure qualité de vision
- Respect de la biomécanique cornéenne : pas de syndrome sec
Limites
- Sizing : calcul de la taille de l’implant L’examen de choix pour déterminer le sizing reste l’UBM
Qualité du sizing mesuré en postopératoire par le vaulting (distance entre l’implant et le cristallin)
Bon vaulting = 250-750 microns
Si vaulting inférieur : risque de cataracte
Si vaulting supérieur : risque de fermeture de l’angle
Des formules permettent d’estimer le sizing :
- NK-V2 : fondée sur l’OCT de SA
Quel bilan préopératoire ?
• Interrogatoire
• Topographie
• Biométrie
• Microscopie spéculaire de référence
• OCT de segment antérieur
• UBM : déterminer le sulcus à sulcus et éliminer la présence de kyste ciliaire qui peut fausser le sizing.
Les résultats sont excellents, avec une satisfaction du patient. La perte endothéliale liée à la chirurgie surtout reste limitée.
En postopératoire, une surveillance du vaulting par l’OCT de segment antérieur est systématique. Dans le cas d’une anomalie, une explantation devra être réalisée. La microscopie spéculaire devra également être surveillée à 6 mois puis de manière annuelle, une importante perte endothéliale exigera une explantation.