La quête du bonheur : réalité ou utopie ?
Compte rendu du webinaire du 4 février 2021 organisé par les laboratoires Alcon à l’occasion du lancement de leur dernière innovation lentille PRECISION 1™.
Pourquoi la santé est-elle au cœur de nos préoccupations aujourd’hui
Luc Ferry, ancien ministre de l’Éducation nationale, philosophe
La question du bonheur, du bien-être, de la santé, est devenue majeure en une cinquantaine d’années. Il est ainsi notable d’identifier les différences de réaction face à la grippe de Hong-Kong en 1968-69 – qui a fait trente-cinq mille morts en France, soit environ 4 fois plus que la grippe saisonnière – en opposition aux réactions conduites face à la Covid-19 aujourd’hui : dans le premier cas, il n’y a eu aucun confinement ni couvre-feu.
Aujourd’hui, la santé a pris une place supérieure dans les pré occupations de nos sociétés vis-à-vis de l’économie toute puissante jusqu’à lors. Ce souci nouveau correspond à une vé ritable rupture sur les plans philosophique et politique dans l’histoire moderne.
Cette rupture est liée à l’effondrement des 2 grands mouvements de pensée en Europe : les religions de salut terrestre, le communisme, qui donnait un sens à la vie, une transcendance ; et le christianisme. Or, quand on ne pense plus à une possible existence après notre vie sur terre, le souci de soi devient logiquement notre pré occupation principale. En parallèle, le développement du capitalisme moderne en tant qu’innovation permanente se ca ractérisant notamment par la destruction de ce qui nous a précédé, a entraîné la rupture avec les traditions. Ce nouveau paradigme est délétère – en ce qu’il détruit notamment des emplois – mais aussi bénéfique, par exemple grâce à sa capacité extraordinaire à développer, dans une période de temps si courte, un vaccin contre la C ovid, dans une entreprise qui est l’incarnation de la mondialisation. Ces bouleversements font que les métiers de la médecine sont des métiers d’avenir, des métiers qui mêlent la science, l’art, l’humain, bénéficient de l’innovation proposée par les laboratoires et qui, en plus, sont portés par cette vague du souci du bonheur, du bien-être et de la santé.
La technologie au service du confort
John Pruitt, directeur R&D Alcon Vision Care
Quels concepts ont conduit Alcon à développer de nouvelles technologies à surface d’eau ?
Les publications mettant en évidence la corrélation entre friction et confort datent d’une dizaine d’années : plus la friction est faible, plus la lentille est confortable. Mais que se passe-t-il réellement au niveau cellulaire et comment les cellules parviennent-elles à ressentir les effets de la friction ? L’université de Floride a développé un modèle de cellules cornéen nes permettant de mesurer en temps réel les effets mécani ques des lentilles de contact à leurs surfaces. Il a été démontré qu’au delà de la friction, les forces de cisaillement peuvent impacter la survie des cellules épithéliales. Elles correspondent à la combinaison de deux facteurs : le coefficient de friction et la pression exercée à la surface des cellules. Afin de limiter l’impact mécanique des lentilles de contact sur les cellules épithéliales, notamment celles présentent au niveau du lid wiper, la R&D Alcon a travai llé sur l’élaboration de matériaux ayant non seulement un meilleur pouvoir lubrifiant mais également une souplesse mécanique plus importante en surface des lentilles afin de limiter ces contraintes de cisaillement. C’est notamment par l’augmen tation de la concentration en eau à la surface d’une lentille qu’il est ainsi possible de diminuer fortement les forces de cisaillement générées par le déplacement de la paupière sur la lentille.
Quelle est la technologie à surface d’eau de la lentille PRECISION 1™ ?
La lentille PRECISION 1™ est composée d’un cœur en silicone hydrogel ayant une hydratation de 51%, permettant d’assurer une bonne transmissibilité à l’oxygène et une bonne qualité optique, combiné à un modulus au cœur modéré (0,6 MPa) pour faciliter la manipulation. La spécificité du matériau de la lentille PRECISION 1™ est la différence de concentration en eau à sa surface supérieure à 80%. Cette augmentation de la concentra tion sur une épaisseur de 2 à 3 µm en surface, permet l’augmentation du pouvoir lubrifiant tout en assurant une très grande souplesse du matériau (modulus inférieur à 20 KPa). Grâce à cette double propriété de surfa ce, les lentilles PRECISION 1™, contrairement aux lentilles à hydratation constante, permettent de limiter les forces de cisaillement (figure 1).
Existe-t-il des études démontrant une réduction des forces de cisaillement avec ces technologies à surface d’eau ?
La collaboration avec l’université de Floride a permis de dévelop per un microtribomètre pour mesurer la friction, la pression et les contraintes de cisaillement sur des cellules cornéen nes vivantes tout en controllant en temps réel leur viabilité grâce à des colorants vitaux. Sans lentille les cellules se régénèrent et se renouvellent en permanence, il existe donc un niveau de dommage cellulaire normal qui a été mesuré en moyenne à 7 cellules par millimètre carré dans cette expérience. Différents matériaux de lentilles de contact ont été mesurés et peuvent être comparés à cette valeur de référence. Le matériau des lentilles PRECISION 1™ a démontré un très faible impact sur les cellules avec une perte cellulaire de 14 cellules par millimètre carré. À titre d’indication les mesures effectuées sur des matériaux traditionnels sans surface d’eau, ont un impact en moyenne 10 à 30 fois supérieur.
Il est donc important de réduire à la fois la friction mais aussi la pression à laquelle les cellules sont exposées et pour ce faire, il convient de renforcer l’hydratation de surface de la lentille.
La satisfaction du patient au cœur de la pratique
Dr Valérie Elmaleh, ophtalmologiste
La satisfaction des patients prend une place importante dans la pratique clinique actuelle. Le nombre de publications scientifiques traitant de la satisfaction du patient a été multiplié par 7 en 30 ans. Mais pourquoi s’intéresser à cette satisfaction ? En contactologie, près de 23% des porteurs de lentilles abandonnent le port dans la première année.
Les principaux critères de cet abandon sont la vision, le confort et la manipulation. Il est donc nécessaire de pouvoir mesurer ces critères pour mieux savoir prédire cet arrêt.
La littérature décrit 3 types d’évaluations subjectives des patients :
- des questionnaires quantitatifs : scoring (comme le questionnaire OSDI portant sur la sécheresse oculaire) ;
- des questionnaires qualitatifs : Likert (comme les enquêtes proposées par l’industrie) ;
- des échelles numériques : échelle de notation subjective (comme l’échelle visuelle analogique de la douleur).
Une étude réalisée sur 59 patients âgés de 18 à 40 ans sur l’évaluation subjective de la satisfaction en lentilles de contact a été menée par Diec et al. en 2018.
Les critères analysés étaient la vision et le confort (notés de 1 à 10) et si le patient souhaitait poursuivre le port (oui/non). Cette étude a permis de mettre en évidence la corrélation direc te entre la satisfaction du porteur et la notation par l’utilisation d’une échelle analogique numérique. Sur l’ensemble des critères mesurés, seule la vision et le confort étaient prédictifs de la volonté de poursuivre le port de lentilles. Pour la vision, 90% des patients se déclarent ainsi satisfaits pour une note supérieure ou égale à 7/10 ; pour le confort durant la journée, une note supérieure ou égale à 8/10. Si ces 2 critères étaient atteints (7/10 pour la vision [figure 2] et 8/10 pour le confort [figure 3]), 86% des porteurs désiraient poursuivre le port. Si un seul des critères avait atteint la note palier, il ne restait plus que 1 patient sur 2 souhaitant poursuivre le port. Enfin, si aucune note palier n’était atteinte, aucun patient ne souhaitait poursuivre le port.
Le Dr Elmaleh a mis en place ce protocole dans le cadre de sa consultation contactologie. L’évaluation a été conduite sur des nouveaux porteurs ou des rééquipements d’anciens porteurs avec la lentille jetable jour nalière PRECISION 1™ après 5 jours de port. Le questionnaire était composé de 4 questions fermées :
1. Entre 1 et 10, quelle note donnez-vous à la manipulation de cette lentille ?
2. Entre 1 et 10, quelle note donnez-vous à votre confort avec cette lentille ?
3. Entre 1 et 10, quelle note donnez-vous à votre vision avec cette lentille ?
4. Souhaitez-vous que cette lentille vous soit prescrite ?
Sur la série de 10 patients ayant répondu à ce questionnaire, les critères de confort, vision mais également de manipulation ont démontré leur importance dans la volonté des patients de poursuivre l’adaptation.
Ces évaluations subjectives peuvent s’étendre au delà du cadre de l’adaptation des lentilles de contact, et permettre ainsi une meilleure prise en charge des patients.
En pratique
• D’un point de vue philosophique
La recherche de la satisfaction, et l’émergence des notions de bien-être dans la santé sont des éléments clefs à prendre en compte dans le développement des innovations proposées par l’industrie.
• D’un point de vue technologique
La limitation des forces de cisaillement à la surface de l’œil par les technologies à surface d’eau, permet de diminuer significativement l’apoptose cellulaire consécutive au stress inflammatoire et mécanique pouvant être induit par le port d’une lentille.
• D’un point de vue clinique
L’utilisation d’échelles numériques pour mesurer la satisfaction des porteurs permettent au regard des études disponibles sur ce sujet, de mieux comprendre les mécanismes liant satisfaction et volonté de poursuivre le port de lentilles.