Homère, une vaste enquête
« Alors que l’on estime à 1,7 million le nombre de personnes atteintes d’un trouble de la vision en France et qu’un aveugle naît toutes les 15 heures (données Fédération des aveugles, 2015), il n’existe pas à ce jour de données à grande échelle sur la situation des personnes déficientes visuelles dans notre pays », déplore le communiqué de presse d’un collectif rassemblant de nombreuses associations dédiées aux personnes malvoyantes ou non-voyantes, des partenaires privés et un consortium de recherche. Celui-ci a donc décidé de lancer une grande enquête, nommée « Homère », basée sur un questionnaire en ligne pour les personnes malvoyantes et leurs aidants.

Conçue par des chercheurs des universités Lyon 2 et Paris 8 et lancée en février 2021, cette étude est la plus grande jamais menée en France sur la population déficiente visuelle. Ses résultats ont été présentés à Paris début févier. 1 865 répondants ont rempli le questionnaire : 46% sont aveugles, 24% malvoyants sévères et 30% malvoyants moyens. 5% des répondants ont entre 0 et 15 ans, 5% entre 16 et 39 ans, 34% entre 40 et 59 ans et 56% 60 ans et plus. L’enquête révèle notamment qu’alors que « la maîtrise du braille est une compétence essentielle pour l’autonomie de la personne aveugle ou malvoyante sévère », elle varie considérablement en fonction de l’intensité et de l’âge de survenue de la déficience : 79% des personnes aveugles de naissance sont braillistes, contre 15% après 40 ans et 0% après 60 ans. Cependant, 15% des répondants non-braillistes déclarent qu’ils auraient eu besoin d’apprendre le braille, mais qu’ils n’en ont pas eu l’occasion, suggérant ainsi la nécessité d’offrir davantage d’opportunités de l’apprendre. « Concernant leur rapport au numérique, 65% des répondants utilisent Internet tous les jours ou presque, expose l’enquête. Écrire des courriels de façon autonome est simple pour 60% des personnes alors que réaliser des démarches en ligne de façon autonome ne l’est que pour 10% des répondants. » Sur la question des aides à la mobilité, l’étude souligne que 59% des répondants malvoyants moyens n’en utilisent aucune et que 60% des répondants déclarent avoir connu au moins une fois dans les douze derniers mois une mise en danger (chute, coup, bousculade). Autres freins importants : ceux à la participation sociale. « 63% des répondants de 5 à 15 ans n’ont pas accès aux supports de cours adaptés à leur handicap en même temps que leurs camarades, dénonce l’enquête. En études supérieures, il n’y a pas d’aménagement ou d’adaptation des cours pour la moitié des répondants, et pas d’aménagement des examens pour un tiers d’entre eux malgré les obligations réglementaires. Au travail, près de la moitié seulement des répondants qui ont demandé un aménagement de poste considère qu’il correspond à leur besoin.
N. Le Jannic