Echos SFO 2019. Rétine médicale

Pachychoroïde et choriorétinopathie séreuse centrale
Comment traite-t-on une choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC) en 2019 ? C’est ce à quoi le Dr Élodie Bousquet a répondu en proposant cet arbre décisionnel thérapeutique (figure 1). En effet, il a été montré qu’un apport accru endogène ou exogène de corticostéroïdes ou un dérèglement du cycle nycthéméral du cortisol entraînait une augmentation de l’épaisseur choroïdienne et une dilatation des vaisseaux de la couche de Haller par la voie du récepteur minéralocorticoïde (MR) et non glucocorticoïde, en particulier sur un polymorphisme génétique prédisposant. Ainsi les inhibiteurs du récepteur du MR avec la spironolactone (Aldactone) ou l’éplérénone (Inspra) plus spécifique sont apparus rapidement comme une alternative à la photothérapie dynamique (PDT), avec une résorption du fluide sous-rétinien variant selon les études de 20 à 67%, associée à une diminution de l’épaisseur choroïdienne dès M1. Deux grandes études randomisées multicentriques sont en cours : VICI (éplérénone vs placebo) et SPECTRA (éplérénone vs PDT demi-dose), même si les dernières études rétrospectives n’ont pas montré de différence statistiquement significative d’efficacité entre la PDT et l’antagoniste du MR. Le Dr Bousquet s’est également intéressée aux facteurs prédictifs de bonne réponse des antagonistes du MR, mettant en évidence qu’une épaisseur choroïdienne préalable épaissie au-delà de 515 microns était le meilleur critère prédictif. L’efficacité modérée de ce traitement est également expliquée par l’absence de passage de la barrière hématorétinienne, d’où des voies alternatives d’administration à envisager, en particulier les microsphères de spironolactone en cours d’étude.

La vasculopathie polypoïdale et les néovaisseaux occultes sur pachychoroid pigment epitheliopathy (PPE) ou pachychoroid neovasculopathy sont bien connus. Mais qu’en est-il des néovaisseaux de type 2 sur pachychoroïde, anecdotiques dans la littérature ? Le Dr Claire Scemama-Timsit s’y est intéressée à travers une série rétrospective de 15 patients présentant des néovaisseaux de type 2 idiopathiques du sujet jeune. Elle a retrouvé des caractéristiques de PPE avec une épaisseur choroïdienne augmentée et des pachyvaisseaux dans 80% des cas, à la fois au niveau de l’œil concerné et de l’œil adelphe. Une particularité de ces néovaisseaux est la présence d’une excavation choroïdienne en regard dans la moitié des cas, avec en angiographie ICG un lacis précoce associé à des plages d’hyperperméabilité choroïdienne et à une dilatation des vaisseaux choroïdiens. L’une des patientes de la cohorte a même développé a posteriori une CRSC avec un décollement séreux rétinien (DSR) et un point de fuite typique. Ainsi, l’association à une PPE serait à rechercher en cas de néovaisseau de type 2 non inflammatoire apparemment idiopathique du sujet jeune. Sa physiopathologie pourrait être expliquée par une ischémie locale de la choriocapillaire par compression des pachyvaisseaux adjacents conduisant à l’excavation choroïdienne puis au néovaisseau visible.
Myopie
Durant la présentation du rapport sur la myopie, le Dr Marie-Noëlle Delyfer a rappelé l’importance de dépister par un fond d’œil dilaté les lésions de la périphérie rétinienne chez le myope (très fréquentes et corrélées à la longueur axiale) et de les documenter par l’intermédiaire des nouveaux moyens d’imagerie ultra grand champ. Après des années de débat, il est maintenant établi que seules les déchirures en fer à cheval symptomatiques ou les lésions de l’œil adelphe d’un décollement de rétine controlatéral sont à traiter de manière préventive par photocoagulation laser.
Le Dr Hessam Razavi s’est quant à lui intéressé à la maculopathie myopique, qui représente encore la première cause de malvoyance chez le sujet jeune et grève le pronostic visuel chez le myope fort avec une prévalence de 6,8% à partir de -10 dioptries, et jusqu’à 100% au-delà de -20 dioptries. L’amincissement choroïdien corrélé au degré de myopie représente un facteur indépendant de baisse d’acuité visuelle (BAV). Il est à évoquer dans le cas d’une BAV non expliquée chez un myope fort, favorisant par la suite la survenue de ruptures de la membrane de Bruch. La choroïde est particulièrement amincie dans les zones de modification de courbure du globe dans les cas de dysversion papillaire, de staphylome et de macula bombée (choroïde épaissie au centre et amincie sur les bords du dôme). C’est le changement abrupt d’épaisseur choroïdienne qui favoriserait la survenue d’un DSR, d’une atrophie de l’épithélium épigmentaire et d’une complication néovasculaire.
Thérapeutique
L’espoir est né, avec les anti-VEGF, de révolutionner le traitement de la DMLA exsudative. Cependant, les résultats à 10 ans d’une étude de vraie vie Fight Retinal Blindness! présentés par le Dr Bernard Wolff sont moins optimistes. Sur sa cohorte de 116 yeux, l’AV chute inexorablement, passant de 57,5 lettres (5/10) à baseline à 39,9 lettres (2/10) après 10 ans, avec cependant une nette distinction entre le groupe naïf de tout traitement préalable (AV finale 48,6 lettres) et le groupe prétraité en particulier par PDT (AV finale 29,3 lettres). On note également une plus grande proportion d’anastomose choriorétinienne dans le groupe avec dégradation visuelle alors que dans celui avec stabilisation ou amélioration visuelle, les néovaisseaux visibles sont surreprésentés. Même si le bénéfice est certain, avec un ralentissement de la pente de progression et une AV restant bien meilleure qu’avant l’avènement des anti-VEGF, l’espoir visuel moyen à 10 ans reste médiocre (2,5/10), en dehors d’une sous-population de 25% de bons répondeurs gagnant 7 lettres. Ces résultats décevants sont largement expliqués par la survenue, dans 65% des cas, d’une atrophie centrale et, dans 40% des cas, d’une fibrose rétrofovéolaire ; ces taux passant respectivement à 91et 71% dans le cas d’une PDT préalable.
La recherche doit donc aller vers des traitements visant à cibler la réduction de l’atrophie et la fibrose. Dans un avenir plus proche, de nouveaux anti-VEGF vont arriver sur le marché, avec le brolucizumab (HAWK et HARRIER) qui permet d’espacer l’intervalle d’injection à 12 semaines d’emblée après la phase d’induction dans plus de la moitié des cas, tout en gardant un bénéfice visuel équivalent. Le second candidat est l’abicipar de la famille des DARPins ciblant le VEGF-A ; nous attendons les résultats de l’étude MAPLE où le taux d’effets indésirables inflammatoires a été réduit à 8,9% (vs 15 à 10% dans CEDAR et SEQUOIA). De nouvelles cibles thérapeutiques sont également en cours d’étude, notamment l’inhibition de l’antagonisme de la voie Ang-2 avec le faricimab, qui permet à Ang-1 d’agir à nouveau sur la stabilité vasculaire, en synergie avec la voie du VEGF-A, et dont les résultats de phase II sont prometteurs à la fois dans l’OMD et la DMLA. En parallèle de cela, de nouvelles voies d’administration sont à l’essai et un dispositif implantable à libération prolongée a vu le jour, sans oublier les avancées de la thérapie génique.