Echos SFO 2019. Neuro-Ophtalmologie
La neuro-ophtalmologie a cette année été représentée lors de 3 sessions principales.

L’OCT en neuro-ophtalmologie
Le thème de la session du Club de neuro-ophtalmologie francophone était l’OCT en neuro-ophtalmologie, en accord avec celui du rapport de la SFO. L’importance de l’OCT-RNFL (Retinal Nerve Fiber Layer), systématiquement couplé à l’OCT maculaire, a été abordée sur les plans diagnostique et pronostique et sur celui du suivi.
L’interprétation d’un OCT nécessite avant tout d’en connaître ses limites et ses pièges. La fiabilité des mesures dépend de la qualité du signal et de l’exactitude de la segmentation. L’OCT papillaire (pRNFL) doit toujours être couplé à un OCT maculaire afin de ne pas conclure de manière erronée, devant une perte en pRNFL, à une neuropathie optique qui serait en réalité secondaire à une maculopathie. À l’inverse, un RNFL normal ne signe pas l’absence de neuropathie optique puisque celle-ci sera retardée de quelques mois si la portion rétrolaminaire du nerf optique (névrites optiques, compressions, etc.) est atteinte.
L’interprétation d’une augmentation du pRNFL et la problématique du diagnostic différentiel entre un œdème papillaire minime et un pseudo-œdème (lié ou non à des druses de la papille) ont été largement discutées dans plusieurs sessions. Dans cette indication, l’OCT papillaire classique n’est pas discriminant, mais les clichés papillaires en autofluorescence et les nouvelles techniques EDI (Enhanced Deep Imaging) ou swept-source occupent maintenant une place majeure dans l’aide au diagnostic de druses (superficielles ou profondes) ou de PHOMS (Peripapillary Hyperreflective Ovoid Mass Structure) et permettent ainsi de limiter les indications angiographiques [1]. Il a été rappelé que l’OCT ne remplaçait cependant pas les rétinophotographies (aidées du contexte clinique) qui ont un rôle central dans la comparaison et le suivi, à l’heure où les évolutions techniques compliquent la comparaison entre les différents appareils ou générations d’OCT.
L’OCT est également très utile pour le diagnostic différentiel entre glaucome et neuropathie optique non glaucomateuse. En plus du caractère sectoriel initial de la perte en fibres, prédominant en temporal supérieur et temporal inférieur sur l’OCT RNFL et en temporal inférieur pour les cellules ganglionnaires maculaires (GCC) [2], c’est l’altération des paramètres de la tête du nerf optique qui est le principal facteur discriminant [3]. En effet, quel que soit le stade de la neuropathie optique (perte sectorielle ou diffuse du RNFL), ils seront altérés dans le cas d’un glaucome mais respectés dans les neuropathies optiques non glaucomateuses telles la neuropathie optique ischémique antérieure (à l’exception de la NOIA artéritique), la névrite optique, la neuropathie optique carentielle, la neuropathie optique compressive ou encore la séquelle d’hypertension intracrânienne.
Dans les névrites optiques, l’intérêt de l’OCT à la phase aiguë repose principalement sur l’OCT maculaire, accompagné de clichés en autofluorescence et en infrarouge pour le diagnostic différentiel des maculopathies à fond d’œil normal (CRSC, AZOOR, MEWDS, etc.). Les modifications de l’OCT apparaissent tardivement après un délai de quelques semaines (4) pour les GCC maculaires et de quelques mois (3 à 6) pour le RNFL, avec une perte moyenne de 20 microns [4]. Chez les patients atteints d’une sclérose en plaques (SEP), l’étude de l’œil controlatéral (sain) a permis de mettre en évidence un amincissement du RNFL, amincissement qui semblerait être corrélé au pronostic de la maladie (score EDSS, handicap, NEDA) et à la réponse thérapeutique (patients actifs ou non actifs) [5]. La couche nucléaire interne paraît également jouer un rôle dans le processus inflammatoire et diminuerait chez les patients traités efficacement [6].
Bonnes pratiques en imagerie et en exploration fonctionnelle en neuro-ophtalmologie
Lors d’une deuxième session, il a été rappelé la démarche diagnostique devant une baisse visuelle à fond d’œil normal dont le but est de séparer les causes « oculaires » des causes « neurologiques ». Elle repose sur un examen clinique minutieux (trou sténopéïque, recherche d’un déficit pupillaire afférent relatif, champ visuel) et des examens complémentaires, orientés par la clinique, comprenant notamment l’OCT avec clichés en autofluorescence maculaire (pour le diagnostic des maculopathies occultes) et l’imagerie cérébrale et orbitaire avec des coupes avec saturation de la graisse (séquence FATSAT). Le dosage des anticorps anti-AQP4 doit être demandé devant toute névrite optique sévère et/ou bilatérale, et celui des anti-MOG devant toute névrite optique œdémateuse et/ou récidivante et/ou bilatérale. En effet, le diagnostic entraîne des implications théra- peutiques spécifiques qui diffèrent de la SEP. Alors que l’électrophysiologie a peu d’indications chez l’adulte (suspicion de rétinopathie occulte ou de baisse visuelle fonctionnelle), elle occupe une place essentielle chez l’enfant, en parallèle de l’examen orthoptique qui s’acharne à dépister un microstrabisme ou une anisométropie.
La conduite à tenir devant un œdème papillaire bilatéral implique la réalisation en urgence d’une imagerie cérébrale avec séquences veineuses. Chez les enfants, l’hypertension intracrânienne est très rarement asymptomatique, il n’existe pas de prédominance féminine, l’obésité est moins présente et la mesure de la pression d’ouverture du LCR est peu fiable. Il est important de mesurer le périmètre crânien et de demander un scanner cérébral en cas de suspicion de craniosténose.
Communications libres
Parmi les études rapportées, nous retiendrons l’étude prospective multicentrique du Dr Ducloyer analysant les valeurs prédictives positive et négative du dosage des anti-MOG chez les patients présentant une névrite optique proche des 100% pour les névrites optiques œdémateuses, bilatérales ou récidivantes. Le dosage des anti-MOG doit cependant être réalisé devant toute névrite optique non typique de SEP. Le Dr Zarka a également présenté les résultats d’une étude rétrospective montrant que la valeur de l’excavation papillaire controlatérale et de la protrusion de la papille œdémateuse permettait de différencier les NOIA artéritiques et non artéritiques à la phase aiguë. Le diagnostic de maladie de Horton repose cependant sur le dosage de la vitesse de sédimentation et de la protéine C réactive et la recherche de signes cliniques évocateurs devant toute neuropathie optique aiguë œdémateuse au-delà de 50 ans.
Références bibliographiques
[1] Malmqvist L, Bursztyn L, Costello F et al. The optic disc drusen studies consortium recommendations for diagnosis of optic disc drusen using optical coherence tomography. J Neuroophthalmol. 2018;38(3):299-307.
[2] Hood DC, Raza AS, de Moraes CG et al. Glaucomatous damage of the macula. Prog Retin Eye Res. 2013;32:1-21.
[3] Fard MA, Moghimi S, Sahraian A, Ritch R. Optic nerve head cupping in glaucomatous and non-glaucomatous optic neuropathy. Br J Ophthalmol. 2019;103(3):374-8.
[4] Petzold A, Balcer LJ, Calabresi PA et al. Retinal layer segmentation in multiple sclerosis: a systematic review and meta-analysis. Lancet Neurol. 2017;16(10):797-812.
[5] Balcer LJ, Balk LJ, Brandt AU et al. The international multiple sclerosis visual system consortium: advancing visual system research in multiple sclerosis. J Neuroophthalmol. 2018;38 (4):494-501.
[6] Petzold A. Retinal glymphatic system: an explanation for transient retinal layer volume changes? Brain. 2016:139(11):2816-9.