Echos Neuro-ophtalmologie

Cette année, une large place a été faite à la neuro-ophtalmologie pédiatrique et aux pathologies pupillaires.

Neuro-ophtalmologie pédiatrique
Parmi les présentations de très haute qualité, 3 ont retenu notre attention : les photophobies, les névrites optiques et les neuropathies optiques héréditaires

Photophobies
En neuro-ophtalmologie, la photophobie peut se rencontrer dans les désordres afférents, les désordres efférents et dans les maladies neurologiques sans atteintes oculaires.
Dans les désordres afférents, elle peut figurer au premier plan des neuropathies optiques héréditaires telles que la maladie de Kjer et la neuropathie optique de Leber pédiatrique (par opposition avec les formes typiques après 15 ans où la photophobie est un signe de second plan). La photophobie est rarement un signe inaugural, mais fréquemment présent (surtout éblouissement ++), d’où l’intérêt des filtres antilumière bleue. La photophobie aussi peut être présente dans les neuropathies compressives de l’enfant (gliome, craniopharyngiome, adénome et chordome du clivus).
Parmi les désordres efférents associés à une photophobie, on peut noter le strabisme divergent intermittent (fermeture monoculaire transitoire à l’éblouissement), les mydriases – étant donné que l’éclairement rétinien est augmenté, par exemple dans la pupille tonique d’Adie – et la mydriase congénitale bilatérale.
Enfin, les migraines et le syndrome de neige visuelle sont des atteintes neurologiques pures dans lesquelles on peut retrouver une photophobie chez l’enfant.

Névrites optiques
Les particularités de la névrite optique de l’enfant sont surtout la bilatéralité, la survenue en postinfection ou postvaccination, l’œdème papillaire (présent dans 66% des cas) et une baisse profonde de l’acuité visuelle. De nouvelles recommandations mettent l’accent sur l’importance de rechercher de façon systéma- tique les anticorps anti-AQP4 et anti-MOG et de réaliser une ponction lombaire avec recherche de synthèse intrathécale d’immunoglobulines. L’IRM est bien entendu indispensable, avec un protocole bien adapté (séquences orbitaires) pour la confirmation du diagnostic et l’orientation étiologique. Une particularité étiologique chez l’enfant – en plus de la sclérose en plaques, la neuromyélite optique et la névrite optique associée aux anti-MOG de l’adulte – est l’ADEM (Acute Disseminated Encephalomyelitis), qui se présente cliniquement par un trouble de la conscience ou du comportement avec un déficit neurologique multifocal, dont la neuropathie optique inflammatoire, qui est souvent de bon pronostic, et MOG + dans 50% des cas.

Neuropathies optiques héréditaires
Dans les neuropathies optiques héréditaires, il est important de faire au moins un examen ORL pour rechercher une surdité, et un ECG pour éliminer un syndrome de préexcitation ventriculaire (type Wolff-Parkinson-White), surtout dans les atteintes mitochondriales.
Il est important de noter qu’il existe des neuropathies optiques de Leber autosomales récessives, c’est-à-dire sans atteinte mitochondriale. Dans les rares cas où le tableau est très évocateur et qu’il n’existe aucune mutation, même parmi les gènes les plus rarement touchés, de l’ADN mitochondrial, le laboratoire doit être informé de la forte suspicion diagnostique pour également étudier l’ADN nucléaire.
Le traitement pharmacologique des neuropathies optiques héréditaires reste aujourd’hui insatisfaisant sur le plan de la récupération de la fonction visuelle. Cinq stratégies thérapeutiques pharmacologiques existent :
- contourner le dysfonctionnement induit par la mutation ;
- réduire le stress du réticulum endoplasmique/mitochondries ;
- remplacer le gène muté ;
- remplacer les cellules ganglionnaires altérées ;
- privilégier les mitochondries saines.
Certaines équipes utilisent le régime cétogène dans la neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL), ce qui permettrait la formation de l’ATP sans passer par les premières étapes de la chaîne respiratoire. Enfin, un protocole de recherche est en train d’être mis en place à Angers pour tester la vitamine B3 dans la neuropathie optique dominante et la NOHL.

Atteintes pupillaires
Anisocorie
Les situations les plus inquiétantes sont les anisocories, c’est-à-dire les différences de taille entre les 2 pupilles.
La mydriase bilatérale peut être soit physiologique (lorsqu’elle répond normalement à la lumière), soit pharmacologie (lorsqu’elle ne répond pas à la lumière et peu ou pas à la pilocarpine), soit consister en une dissociation lumière-accommodation vue dans le syndrome de Parinaud (et donc associée à d’autres signes cliniques). La mydriase bilatérale témoin de mort cérébrale est un diagnostic de service de réanimation et jamais une hypothèse pertinente en consultation.
Dans le cas d’un myosis bilatéral, c’est soit aussi physiologique, soit la pupille d’Argyll-Robertson (dans le cadre d’une syphilis tertiaire – très rare), soit un traitement par pilocarpine (de moins en moins rencontré de nos jours). Enfin, il peut s’agir d’un spasme accommodatif.
Lorsqu’il y a une anisocorie, il faut d’abord éliminer une anisocorie physiologique (10 à 20% des cas) : l’anisocorie est isolée, il existe une différence de moins de 1 mm entre les 2 yeux et les pupilles réagissent normalement à la lumière et à l’obscurité. Ensuite, il faut déterminer la pupille anormale (la petite ou la grande) par l’examen à l’obscurité, très important dans l’orientation du diagnostic différentiel et donc de la conduite à tenir. Si la petite pupille est anormale, le plus important est d’éliminer un syndrome de Claude-Bernard-Horner (faible dilatation pupillaire retardée à l’obscurité), qui peut être un signe de dissection carotidienne. Si on a un doute, un test à l’apraclonidine pourra confirmer le diagnostic. Si la grande pupille est anormale, le plus important est d’éliminer une paralysie du III avec atteinte pupillaire, pouvant témoigner d’une compression par un anévrysme. Une fois ces 2 diagnostics éliminés, il n’y a pas de mise en jeu du pronostic vital et le bilan peut être complété sans urgence.

Déficit pupillaire afférent relatif (DPAR)
Un DPAR associé à une baisse d’acuité visuelle unilatérale peut être vu dans une neuropathie optique unilatérale, l’OACR, l’OVCR ischémique, le décollement de rétine et dans le cas d’une atteinte extensive unilatérale de la rétine externe. Un DPAR controlatéral est aussi observé en présence d’une atteinte du tractus optique mais pas dans le cas d’un trouble des milieux, d’une maculopathie ou d’une atteinte limitée de la rétine externe.

Auteurs

  • Maroun Eid

    Ophtalmologiste

    Fondation ophtalmologique A. de Rothschild, service de neuro-ophtalmologie, Paris

  • Rabih Hage

    Ophtalmologiste

    Fondation ophtalmologique A. de Rothschild, service de neuro-ophtalmologie, Paris

L'accès à la totalité de la page est protégé.

Je m'abonne

Identifiez-vous