Compte rendu de l’American Academy of Ophthalmolgy

30 septembre - 3 octobre 2022, Chicago

Chirurgie vitréo-rétinienne

Prise en charge des décollements de la rétine (DR) asymptomatiques
Dr Harry Flynn
Le DR asymptomatique est décrit comme un DR avec absence de phosphène et de déficit subjectif du champ visuel. Il se situe par ordre de fréquence en inféro-temporal, supéro-temporal, supéro-nasal et enfin inféro-nasal, et concerne habituellement les femmes avec une myopie au-delà de -5 D. Deux séries rétrospectives de 31 et 18 yeux sur un suivi de 3,4 et 3,8 ans avaient montré un taux de progression vers un DR symptomatique de 0 à 6,5% (Brod et al., Cohen et al.).
Plus récemment, l’équipe du Dr Flynn a retrouvé, sur une série de 20 yeux, un taux de progression et de vitrectomie de 10% sur un suivi moyen de 5,1 ans. Il n’existe aucune donnée d’étude randomisée comparant la chirurgie vs la surveillance. Une surveillance initiale peut donc être considérée dans les DR asymptomatiques, sous réserve de la possibilité d’un suivi régulier. La chirurgie reste le gold standard dans les DR symptomatiques.

Nouveautés dans la prise en charge des décollements de la rétine (DR) rhegmatogènes
Dr Rajeev Muni
Malgré un taux de succès anatomique élevé postvitrectomie dans les DR rhegmatogènes, 42 à 58% des patients présentent une aniséiconie en postopératoire. Dans l’étude contrôlée randomisée PIVOT (Hilliers et al.) comparant la rétinopexie pneumatique (RP) vs la vitrectomie (V3V) dans la prise en charge des DR rhegmatogènes, l’acuité visuelle à 1 an dans le groupe RP était significativement supérieure de 4, 9 lettres par rapport au groupe V3V (p = 0,02), avec un taux de métamorphopsies verticales moindre dans le groupe RP (37,9% vs 56,7%, p = 0,035). Dans une autre étude rétrospective incluant 238 yeux (Brosh et al.), le taux de déplacement rétinien en autofluorescence était de 7% dans le groupe RP vs 44,4% dans le groupe V3V. L’étirement de la rétine et donc l’augmentation de l’espace entre les cônes au niveau de la macula causés par la bulle de gaz complète et la persistance d’un liquide sous-rétinien en postopératoire immédiat expliqueraient les symptômes de type aniséiconie et métamorphopsie verticale qui sont plus importants après une V3V qu’en RP.
Le succès anatomique n’équivaut pas au succès fonctionnel malgré un gain visuel satisfaisant.

Oncologie

Toxicité rétinienne des nouveaux traitements anticancéreux
Dr Jasmine H. Francis
De nouvelles thérapies anticancéreuses sont désormais disponibles, avec un taux de toxicité rétinienne variable. Les inhibiteurs de BRAF, notamment dans le traitement des mélanomes, agissent sur la voie des MAP-kinases et peuvent induire une uvéite antérieure (4,5%), une panuvéite (moins de 1%), un œdème maculaire cystoïde (moins de 1%) ou encore un VKH-like. Ces atteintes peuvent répondre aux corticoïdes et nécessiter l’arrêt du traitement dans les cas les plus sévères.
Les inhibiteurs de MAP-kinases (FGFRi, MEKi, ERKi) peuvent entraîner dans 15% des cas une MAP-kinase rétinopathie avec des décollements séreux rétiniens (DSR). Le mécanisme de cette rétinopathie est inconnu. Les DSR sont souvent intermittents, temporaires et réversibles, et ne nécessitent pas l’arrêt du traitement. Cette rétinopathie est à différencier de la choriorétinite séreuse centrale (CSC). Dans la MAP-kinase rétinopathie, les DSR sont souvent multiples, l’OCT montre une élongation de la zone d’interdigitation (ZI) qui est distinguable de la zone ellipsoïde (ZE). Il n’y a pas de points hyperréflectifs. À la résolution des DSR, ces 2 couches restent hyperréflectives et intactes. Dans la CSC, le DSR est plus souvent unique, avec une coulée gravitationnelle. L’OCT peut montrer un décollement de l’épithélium pigmentaire concomitant, une perte de réflectivité de la ZE et de la ZI, avec des points hyperréflectifs dans la choroïde et la rétine. À la résolution des DSR, il peut persister des altérations de l’épithélium pigmentaire ainsi que de la ZI et de la ZE. Les inhibiteurs de MAP-kinases peuvent engendrer, toutefois plus rarement, une occlusion de la veine centrale de la rétine (0,5%).
Les inhibiteurs de checkpoints (CTLAi, PD-1i, PD-L1i) potentialisent la réponse des lymphocytes T et peuvent entraîner une inflammation oculaire dans 1% des cas : œdème maculaire cystoïde, panuvéite, uvéite antérieure, œdème papillaire, neurorétinite, VKH-like, neurorétinopathie maculaire aiguë, vas- cularite rétinienne ou encore effusion uvéale. Leur traitement peut nécessiter des corticoïdes locaux, systémiques, des immunoglobulines intraveineuses, une plasmaphérèse ou encore l’arrêt du traitement.

Résultats des essais cliniques en cours dans la DMLA atrophique

Efficacité et tolérance de l’avacincaptad pegol (ACP) à 1 an de la phase III de GATHER2
Dr Arshad M Khanani et Dr Jeffrey S Heier
L’ACP inhibe spécifiquement le facteur 5 du complément (C5) et préserve potentiellement les propriétés anti-inflammatoires du C3. L’inhibition du C5 ralentit l’inflammation et la mort cellulaire associées au développement et à la progression de l’atrophie géographique.
GATHER2 est un essai contrôlé randomisé comparant des injections intravitréennes (IVT) mensuelles d’ACP 2 mg (n = 225) vs des IVT mensuelles de sham (n = 222) la première année. Les critères d’inclusion comprenaient la présence d’une atrophie géographique dans les 1 500 µm centraux n’impliquant pas le point central, avec une acuité visuelle comprise entre 20/25 et 20/320. À 1 an, il existait un ralentissement de la croissance de l’aire d’atrophie géographique de 14,3% dans le groupe ACP vs le groupe sham (p = 006). Les effets indésirables incluaient un taux de néovascularisation choroïdienne de 6,7% dans le groupe APC vs 4,1% dans le groupe sham, avec une exsudation maculaire dans 4,9% vs 3,2% des cas respectivement. Il n’y avait pas d’inflammation intraoculaire. L’ACP est le premier traitement à montrer une efficacité dans le ralentissement de la croissance de l’atrophie géographique à 1 an, avec un profil de sécurité consistant.

Efficacité et de tolérance du pegcetacoplan à 2 ans de la phase III de DERBY and OAKS
Dr Charles C Wykoff
Le pegcetacoplan inhibe la voie du complément par liaison avec le C3 et le C3b. DERBY and OAKS est un essai contrôlé randomisé comparant des IVT mensuelles ou bimestrielles de pegcetacoplan vs des IVT mensuelles ou bimestrielles de sham. Les critères d’inclusion comprenaient la présence d’une atrophie géographique avec ou sans atteinte rétrofovéolaire, avec une acuité visuelle supérieure ou égale à 20/320. À 2 ans, il existait un ralentissement significatif de la croissance de l’atrophie géographique de 19 à 22% dans le groupe pegcetacoplan mensuel et de 16 à 18% dans le groupe pegcetacoplan bimestriel vs le groupe sham. Les effets secondaires incluaient un taux d’inflammation intraoculaire de 2,1 à 3,8% dans les groupes pegcetacoplan vs 0,2% dans le groupe sham, dont 21% d’inflammation sévère. Il n’y avait ni atteinte rétinienne ni vascularite occlusive, ni arrêt d’étude en raison de l’inflammation. L’incidence de la DMLA exsudative était de 12,2% dans le groupe pegcetacoplan mensuel vs 6,7% dans le groupe pegcetacoplan bimestriel vs 3,1% dans le groupe sham. Le pegcetacoplan en bimestriel ou en mensuel a montré une réduction de la croissance de l’atrophie géographique avec ou sans atteinte rétrofovéolaire à 2 ans. Il existait en revanche une incidence élevée de DMLA exsudative.

Auteurs

  • Marion Lam

    Interne en ophtalmologie

    Hôpital Lariboisière, Paris

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