Comment optimiser vos résultats cliniques avec les implants multifocaux et monofocaux Plus : les points clés

La chirurgie de la cataracte a connu ces dernières années des avancées significatives grâce aux implants intraoculaires multifocaux et monofocaux Plus. Ces innovations offrent aux patients la possibilité d’une plus grande indépendance vis-à-vis des lunettes. Dans cet article, nous présenterons les retours d’expérience du Pr Corinne Dot et du Dr Camille Bosc, ainsi que les recommandations du Dr Pascal Rozot concernant la sélection des patients pour une implantation trifocale réussie.
SAFIR 2023 – Symposium Hoya

Multifocalité trifocale – Retour d’expérience
D’après l’intervention du Pr Corinne Dot (Lyon)
Dans le cadre de la multifocalité, les implants trifocaux Gemetric et Gemetric Plus de chez Hoya ont été lancés sur le marché en 2022. Leur design et le matériau hydrophobe qui les compose sont bien connus, puisque communs à toute la gamme Vivinex ; ils ont démontré leur efficacité pour limiter l’incidence d’une opacification capsulaire secondaire.
Les implants trifocaux Gemetric et Gemetric Plus sont dotés d’un filtre de lumière bleue. Ils sont préchargés dans le système d’injection multiSert offrant 2 modes d’injection (à poussoir ou à vis) et sont implantés via une incision de 2,2 mm.
Une version torique est disponible, avec des options allant de T2 à T6. Des études ont rapporté la stabilité de l’implant Vivinex torique avec une rotation moyenne de 1° (étude de Menapace), sans corrélation entre longueur axiale et rotation. Il est primordial de corriger l’astigmatisme pour optimiser les résultats postopératoires, d’autant plus en multifocalité. Un astigmatisme résiduel de 1 D aura un impact sur la vision de loin (VL) (6/10e) et donc sur la vision intermédiaire (VI) et la vision de près (VP). Il est recommandé de corriger l’astigmatisme inverse dès 0,75 D.
À noter, l’obtention d’une plus grande précision réfractive en tenant compte de l’astigmatisme total de la cornée en utilisant la formule de régression Abulafia-Koch dans le calculateur torique de Hoya. Cette méthode s’est révélée plus précise que celle du IOL 700 pour les implants Vivinex toriques, dans une étude de janvier 2023 parue dans le JRS.
Les 2 implants Gemetric et Gemetric Plus ont les mêmes additions : +1,75 D pour la VI et +3,50 D pour la VP.
Leur optique comprend une zone diffractive de 3,2 mm, avec 8 marches non apodisées. La différence entre les 2 mo­dèles réside dans la répartition de l’énergie lumineuse – plus importante pour la VP avec Gemetric Plus (donc une hauteur de marches différentes selon l’implant).
Le Pr Dot a partagé son expérience personnelle avec ces implants, fondée sur l’observation de 34 yeux. Les ­résultats obtenus en binoculaire étaient en moyen­ne de 10/10e en VL, P2 en VI (à 66 cm) ainsi qu’en VP (à 40 cm) à M6, avec l’amélioration progressive au fil du temps caractéristique des multifocaux. À 6 mois, 100% des patients étaient indépendants aux lunettes. Le score photique rapporté était très bas (5,8/36) ; la tolérance et sécurité de l’emploi, bonnes.
En conclusion, les implants trifocaux Gemetric et Gemetric Plus ont montré d’excellents résultats dans l’étude prospective présentée. Ils sont faciles à injecter et présentent peu de complications, grâce notamment à leur matériau hydrophobe, et leur version torique s’est ­révélée stable dans le sac. Des études comparatives dans la littérature seront nécessaires pour conforter ces premiers résultats.

Implants monofocaux Plus – Critères pour un résultat clinique optimal et bénéfices pour les patients
D’après l’intervention du Dr Camille Bosc (Nantes)
Le Dr Camille Bosc effectue environ 1 000 interventions de la cataracte par an, dont un tiers sont réalisées avec des implants monofocaux Plus et un tiers avec des implants multifocaux.

L’implant Vivinex Impress est un implant monofocal Plus de chez Hoya. Il est hydrophobe, préchargé, et son optique présente une asphéricité centrale modifiée (non diffractive) (figure 1). En ­prati­que, l’indication de cet implant est adaptée lorsque le diamètre de la pupille non dilatée du patient se situe à 3-3,5 mm (pour bénéficier de l’effet EDOF) et lors­que le taux d’aberrations de haut grade est inférieur à 0,5. D’où l’intérêt de réaliser une topographie cornéenne préopératoire.
En revanche, l’implant monofocal Plus n’est pas recommandé dans certaines situations : forte amétropie, décentrement pupillaire important, cornée trop irrégulière, patient ayant des attentes visuelles très élevées en VP.
Le Dr Bosc a présenté ses résultats personnels dans une étude rétrospective sur 2 ans portant sur 282 yeux (141 pa­tients), comprenant 54 yeux avec ­l’implant Vivinex Impress (Hoya) – recrutement le plus récent –, 100 yeux avec l’implant Zoe (Ophtalmo Pro) et 124 yeux avec l’implant IsoPure (Physiol). Les résultats réfractifs sont excellents mais il faut noter que la cible réfractive peut légèrement varier en fonction de l’implant utilisé (emmétropie légèrement positive de l’œil directeur pour Vivinex Impress et Zoe ; première valeur négative pour IsoPure).

Pour 76% des patients implantés avec Vivinex Impress, une acuité visuelle (AV) moyenne binoculaire sans correction de loin inférieure à 0,1 logMAR (8/10e) et à 0,3 logMAR (P3-P4) a été obtenue à M1. Ces implants permettent d’étendre la plage de vision fonctionnelle par rapport aux implants monofocaux conventionnels.
Il est important de prendre en compte ces résultats lors de la prescription de l’addition postopératoire, car 56% des patients ayant reçu l’implant Vivinex Impress avaient besoin d’une addition minimale inférieure à 1,75 D.
En conclusion, les implants monofocaux Plus offrent des bénéfices certains. Cela nécessite d’adapter les pratiques pré- et postopératoires, notamment en éliminant les mauvaises indications (en utilisant la topographie préopératoire, par exemple). Dans l’étude présentée, l’implant Vivinex Impress de Hoya semblait être le plus reproductible pour ce qui concerne le gain d’AV en VI et VP. De plus, il présente l’avantage d’être préchargé dans un système d’injection de qualité.
Lors des discussions, il a été souligné l’importance de sélectionner le type d’implant en fonction de la forme et de la courbure de la cornée, ainsi que la possibilité d’utiliser la monovision « avancée » (avec des implants monofocaux Plus ou des EDOF), qui permet d’obtenir de meilleures courbes de défocalisation ­bino­culaires (meilleure profondeur de champ bénéfique pour la vision rapprochée) comparées à la monovision pratiquée avec des implants monofocaux simples, traditionnels.

Implants trifocaux – Critères de sélection pour une implantation réussie
D’après l’intervention du Dr Pascal Rozot (Marseille)
Pour sélectionner les patients de manière appropriée, il est essentiel de réaliser un interrogatoire approfondi, un examen ophtalmologique complet (du film lacrymal à la macula) et un OCT maculaire systématique. Il est également important d’évaluer attentivement les habitudes de vie du patient (profession, loisirs, conduite automobile, écrans, lecture…), afin de déterminer les distances de vision pour lesquelles le patient a les plus hautes exigences. Cela permet d’optimiser le choix de l’addition de l’implant en fonction des distances privilégiées par le patient.
Un dispositif récent, pas encore disponible en France, appelé Vivior Monitor, a été conçu pour évaluer les habitudes visuelles des patients dans leur vie courante. Placé sur une branche de lunettes, il analyse le regard et les distances de vue préférentielles du patient pendant 48 heures grâce à un système de gyroscope. Les données sont enregistrées dans un cloud puis retranscrites sous forme de courbes. Cet outil permet de définir un indice de corrélation avec le style de vie du patient (données subjectives) et de simuler différentes options d’implants en conséquence. Cependant, son utilité en pratique clinique reste à évaluer.
L’implantation trifocale nécessite une précision biométrique et réfractive, d’où l’importance d’utiliser des formules adap­tées aux longueurs axiales pour atteindre l’emmétropie (cible réfractive). Des calculs dérivés de l’intelligence artificielle, tels que les formules Kane ou Pearl DGS, permettent d’affiner les calculs, notamment en cas de doute sur certaines puissances.
​​​​​​​Il existe aujourd’hui de nombreux implants multifocaux sur le marché, d’où l’intérêt de bien connaître leurs caractéristiques – puissances d’addition, répartition d’énergie lumineuse et dépendance pupillaire.

Parmi eux, les implants Gemetric et Gemetric Plus proposés par Hoya, dotés des mêmes puissances d’addition en VI et VP mais avec une répartition d’énergie lumineuse différente (figure 2) : plus de lumière allouée au foyer de loin avec Gemetric, plus de lumière allouée au foyer de près avec Gemetric Plus, quantité d’énergie lumineuse en VI similaire pour les 2 mo­dèles. Il est important de connaître cette différence pour optimiser les indications. Les premiers résultats d’une étude multi­centrique ont montré que la combinaison de Gemetric et Gemetric Plus permettait d’obtenir d’excellents résultats à toutes les distances (plus de 10/10e en VL, 8/10e en VI et plus de 9/10e en VP) (figure 3).
La courbe de défocalisation binoculai­re (Gemetric) relative à l’expérience personnelle du Dr Rozot montre des AV de 8/10e entre -1,50 et -3,00 (VI/VP) et 10/10e en VL.

Autre avantage des implants Gemetric et Gemetric Plus : le système d’injection multiSert, qui séduit par sa simplicité d’utilisation et sa reproductibilité.
Les indications des implants trifocaux dépendent de 3 critères étroitement liés : l’âge, les habitudes du patient et l’amétropie initiale.

Indications générales
En fonction de l’âge du patient
• Patients de moins de 75 ans : en première intention, les implants trifocaux de dernière génération sont recommandés.
• Patients de plus de 75 ans avec une arrière-pensée maculaire : des implants bifocaux ou trifocaux en piggy back primaire peuvent être utilisés.
• Cataracte congénitale ou infantile (3 à 5 ans) : les implants trifocaux, souvent toriques, ont donné des résultats satisfaisants.
• Sujet jeune non presbyte avec cataracte unilatérale :
- sur œil dominé : l’implant trifocal peut être envisagé ;
- sur œil dominant : éviter les implants trifocaux et préférer les implants EDOF ou réfractifs.

En fonction de l’habitus du patient
• Patient standard, souhaitant être le moins dépendant possible des lunettes : les implants trifocaux ou similaires sont recommandés.
• Prudence chez les patients suivants : « grand conducteur », patient craintif des halos ou à larges pupilles, patient avec des facteurs psychologiques particuliers insistant sur l’implantation trifocale : il est préférable de choisir des implants EDOF ou plus standard.

En fonction de l’amétropie initiale
• Hypermétropes : ce sont les patients les plus satisfaits de l’implantation trifocale. Comme la plupart des implants leur conviennent dans plus de 90% des cas, il faut sélectionner le trifocal en fonction de leur mode de vie.
• Myopes : une VP de qualité suffisante est nécessaire (Gemetric Plus) ; intérêt de discuter la monovision.
• Astigmates : les implants toriques sont recommandés dès 0,60-0,70 D d’astigmatisme cornéen total pour améliorer la qualité de vision.

Il faut rester très prudent dans le cas d’une chirurgie cornéenne réfractive pré­alable (topographie préopératoire obligatoire) : aléas réfractifs et impact sur les résultats fonctionnels potentiels.
En conclusion, un suivi postopératoire est indispensable, avec une écoute attentive, un discours rassurant et des mesures correctrices d’ajustement réfractif si le patient n’est pas satisfait (information préopératoire). Il est important d’avoir une approche réfractive systématique pour obtenir une satisfaction optimale sans exclure aucune option. La personnalisation du choix de l’implant trifocal est également essentielle pour obtenir un taux de satisfaction élevé.

Conclusion
Les retours d’expérience partagés lors de ces interventions témoignent des avantages de l’implantation monofocale Plus et trifocale (version torique incluse), et donnent un éclairage sur les critères de sélection pour obtenir des résultats optimaux. La sélection appropriée des patients et des implants, combinée à une évaluation préopératoire approfondie, demeure essentielle pour garantir la satisfaction postopératoire des patients. 

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