Actualité rétine médicale. Compte-rendu CFSR

Actualité rétine médicale Compte-rendu CFSR Cette journée CFSR (Club francophone des spécialistes de la rétine) fut, comme chaque année, riche en enseignements, avec des communications d’experts dans tous les domaines de la rétine. Voici un bref tour d’horizon des informations marquantes ou à retenir en rétine médicale.
Rétine pédiatrique
Pour commencer, l’actualité en rétine pédiatrique a été marquée par plusieurs évolutions, notamment concernant la rétinopathie des prématurés (ROP).
Le Dr Georges Caputo a présenté les évolutions dans la classification et le dépistage de la ROP faisant suite à la publication de l’étude ICROP3. La première nouveauté est la définition d’une nouvelle zone 2 postérieure, s’étendant jusqu’à 2 diamètres papillaires en avant de la limite de la zone 1. Un nouveau terme est apparu dans la classification, le Notch, correspondant à l’extension en doigt de gant de 1 à 2 diamètres papillaires de la ROP. La notion de stade pré-Plus, permettant un continuum avec le stade Plus, a également été intégrée à la classification. La notion d’APROP (Aggressive Posterior Retinopathy Of Prematurity) a laissé place à l’AROP (Aggressive Retinopathy Of Prematurity), qui n’est plus uniquement déterminée en zone 1 mais sur l’ensemble de la rétine. Deux autres termes ont été définis : la régression et la réactivation.
Les traitements actuels de la ROP ont été abordés par le Dr Amandine Barjol, avec la tendance à un traitement plus précoce. Les anti-VEGF doivent être utilisés dans les formes agressives avec un stade Plus ou pré-Plus en zone 1 ou 2 postérieure. Le traitement par laser est quant à lui préférable lorsque la ROP est en zone 2.
DMLA
Les prochains traitements attendus dans la DMLA sont nombreux, avec des principes d’action variés.
Le Dr Hassiba Oubraham a abordé le traitement par brolucizumab dans la DMLA, pour lequel différentes études ont permis de montrer que la sélection des patients était très importante, les patients les plus à risque de faire une vascularite étant ceux présentant des antécédents d’inflammation intraoculaire. Il est donc nécessaire d’examiner les patients avant chaque injection et de ne pas réinjecter en cas d’inflammation, mais de traiter de manière intense par corticoïdes. Les études en cours dans la DMLA (OCTOPUS, SWIFT et TALON) vont permettre d’obtenir plus de données sur la sécurité du médicament.
Le faricimab a été présenté par le Pr Laurent Kodjikian. Il s’agit d’un anticorps monoclonal IgG1 humanisé bispécifique anti-VEGF-A et anti-Ang-2. Cette molécule a été approuvée par la FDA (Food and Drug Administration) aux États-Unis en janvier 2022. Les études pivotales de phase III, TENAYA et LUCERNE, ont montré une non-infériorité du faricimab administré en Q16 concernant l’acuité visuelle par rapport à l’aflibercept en Q8 à 1 an. De faibles taux d’inflammation intraoculaire (2% dans le groupe faricimab Q16 vs 1,2% dans le groupe aflibercept Q8) ont été rapportés, mais aucun cas de vascularite rétinienne. Les résultats à 2 ans de ces 2 études sont attendus pour juillet 2022 et l’AMM européenne pour septembre 2022.
Le Dr Hessam Razavi a présenté l’aflibercept haute dose, évalué par l’étude de phase II CANDELA. Cette étude suggère une meilleure réponse anatomique et fonctionnelle de l’aflibercept 8 mg par rapport à l’aflibercept 2 mg. Les résultats de l’étude de phase III PULSAR, à laquelle la France participe, sont en attente.
Enfin, le Pr Jean-François Korobelnik a abordé les inhibiteurs du complément qui sont actuellement en développement dans la DMLA atrophique. Le pegcetacoplan est un inhibiteur du complément C3, dont le but est de ralentir la mort cellulaire. Les résultats à 18 mois des études OAKS et DERBY qui ont été présentés au congrès de l’ARVO 2022 quelques jours auparavant ont montré une réduction de la croissance des lésions atrophiques avec un profil de tolérance favorable. Une autre molécule, l’avacincaptad pegol, un inhibiteur du complément C5, est également en cours d’étude dans la DMLA atrophique.
Conférence du CFSR
Cette journée a été marquée par la conférence invitée du CFSR avec l’intervention du Pr Amani Fawzi à propos de l’OCT-A dans la rétinopathie diabétique (RD). Tout au long de la communication, le Pr Fawzi a illustré ses propos avec de belles images OCT-A et abordé la richesse des données évaluables en OCT-A afin de mieux comprendre et monitorer la RD. Son intervention a été clôturée par un rappel sur l’importance d’acquérir des images OCT-A de qualité afin d’obtenir une analyse fiable des données.
Diabète
L’après-midi s’est poursuivi par des communications sur le thème du diabète.
Le Pr Pascale Massin a ainsi abordé le sujet de l’intelligence artificielle (IA) dans la RD. De nombreux algorithmes de dépistage de la RD ont été développés ces dernières années. Certains ayant obtenu le marquage CE ont été directement intégrés à des rétinographes avec IA embarquée. Le Pr Massin a conclu en affirmant que ces algorithmes devront être utilisés dans le cadre d’un parcours de soins défini, avec la supervision d’un ophtalmologiste.
Le Dr Sophie Bonnin a ensuite présenté les dernières nouveautés quant à l’utilisation de l’OCT-A au cours du diabète. Les paramètres OCT-A devraient être intégrés dans un nouveau système de classification afin d’améliorer l’évaluation de la RD dans le futur, ce qui constitue le cœur du projet EVIRED en cours en France.
Enfin, cette thématique a été clôturée par le Dr Aude Couturier, qui a illustré par une riche iconographie les effets suspensifs des anti-VEGF sur la RD, en insistant sur la nécessité d’une surveillance rétinienne rapprochée par rétinophotographie, OCT-A et/ou angiographie à la fluorescéine à l’espacement des injections.
Myopie
La journée s’est poursuivie par une session consacrée à la myopie. Le Pr Ramin Tadayoni a présenté une proposition simple de nomenclature concernant les maculopathies tractionnelles de la myopie forte. Il s’agit d’énoncer d’abord le problème principal, puis les éventuelles associations, en ajoutant à la fin « maculaire myopique » ou « du myope ».
Le Pr Salomon Yves Cohen a exposé 4 hypothèses physiopathologiques pour comprendre les anomalies liées aux dysversions papillaires. Celles-ci reposent sur le point de cassure dans la zone jonctionnelle, la croissance inégale entre la partie inférieure du fond d’œil par rapport à la partie supérieure, un déséquilibre entre le contenant et le contenu, et enfin des turbulences de flux choriorétinien dues à un pincement de la choroïde entre les deux zones du fond d’œil.
Dernières nouveautés
Enfin, pour terminer, des communications sur les dernières nouveautés ont été présentées. Le Pr Alain Gaudric a développé la problématique du diagnostic différentiel qui peut se poser entre choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC) chronique et effusion uvéale en présentant de nombreux cas cliniques richement iconographiés. En dehors du contexte de nanophtalmie, l’effusion uvéale est peu documentée. Il est également possible que des cas d’effusion uvéale soient des CRSC sévères.
Le Pr Catherine Creuzot-Garcher a rappelé les principes essentiels de la prophylaxie des endophtalmies en chirurgie rétinovitréenne, avec l’importance entre autres de l’utilisation de la povidone iodée et de la recherche d’une incarcération vitréenne en fin d’intervention, et ce d’autant plus en l’absence de tamponnement. L’injection intracamérulaire de céfuroxime, lorsqu’une chirurgie de la cataracte est réalisée en même temps qu’une chirurgie du segment postérieur, est recommandée et ce, même en cas de rupture capsulaire. Enfin, la rédaction d’un consensus professionnel de la prophylaxie de l’endophtalmie dans la chirurgie rétinovitréenne sera prochainement proposée.